A few thoughts, a few sayings

-"Je suis celui qui te connais quand tu fuis jusqu'au bout du monde" Jacques Bertin (Je suis celui qui court)

- "Je ne suis pour toi qu'un renard semblable à cent mille renards. Mais, si tu m'apprivoises, nous aurons besoin l'un de l'autre. Tu seras pour moi unique au monde. Je serai pour toi unique au monde..." Saint-Exupéry (Petit Prince)

- "Et le plus beau, tu m'as trahi. Mais tu ne m'en as pas voulu" Reggiani (Le Vieux Couple)

- "We all got holes to fill And them holes are all that's real" Townes Van Zandt (To Live is To Fly)

- "Et de vivre, il s'en fout, sa vie de lui s'éloigne... Tu marches dans la rue, tu t'en fous, tu te moques, de toi, de tout, de rien, de ta vie qui s'en va." Jacques Bertin (Je parle pour celui qui a manqué le train)

- "I thought that you'd want what I want. Sorry my dear." Stephen Sondheim (Send in the clowns)

- "Pauvre, je suis de ma jeunesse, De pauvre et de petite extrace. Mon père jamais n'eu grand richesse, Ni son aïeul nommé Orace. Pauvreté nous suit à la trace, sur les tombeaux de mes ancêtres, Les âmes desquels Dieu embrasse! On n'y voit ni couronnes ni sceptres." François Villon (Pauvre, je suis)

- "Vous êtes prêts à tout obéir, tuer, croire. Des comme vous le siècle en a plein ses tiroirs. On vous solde à la pelle et c'est fort bien vendu" Aragon (Ce qu'il m'aura fallu de temps pour tout comprendre)

- "And honey I miss you and I'm being good and I'd love to be with you if only I could" Bobby Russell (Honey)

- "And I need a good woman, to make me feel like a good man should. I'm not saying I am a good man Oh but I would be if I could" Fleetwood Mac (Man of the World)

- "Je ne comprends pas ces gens qui peuvent s'installer n'importe où quand je cherche inlassablement avec la tête fermée que tu connais l'endroit où je retrouverai mon enfance" Jacques Bertin (Colline)

mardi, juin 01, 2010

Chemin vers pensée - Chapitre 1

Je pars d'un côté totalement différent de ce que j'ai fait auparavant (probablement du à ma lassitude face à la fantasy) j'envisage plus quelque chose dans l'idée (sans juger de la qualité de ce que je fais) du Candide de Voltaire avec l'inspiration et les idées qui viennent. Même si l'idée de base m'est venue lors de l'écoute de la mémoire neuve de Dominique A.

Elle avait les cheveux bruns, tirant vers le roux, la taille fine. Il avait déjà envie d'elle alors qu'il venait à peine d'entrer dans la pièce. Son membre se tendait contre ses chausses. Son être entier semble ainsi s'étirer vers elle, chercher à l'atteindre plus vite. Il ferma la porte et attendit à l'entrée. Il avait besoin de la toucher, cela faisait si longtemps. Elle crispa ses épaules lorsqu'elle l'entendit, elle savait que c'était lui. Elle avait toujours eu ce don pour le sentir, le lire comme s'il était transparent pour elle. Cela l'avait désarçonné au début, lui qui se trouvait si malin, si secret.

Il ouvrit la bouche pour murmurer son nom, sa main se leva lentement, anticipant la caresse qu'il lui donnait déjà en songe. Mais elle se tourna brusquement, brisant le rêve éveillé, le ramenant à la triste réalité.
"Vas-t-en, je ne veux plus te voir Romain, tu ne comprends pas?" Elle se jeta sur lui, ses yeux rougis par les pleurs. Depuis qu'elle sait que je vais venir pensa-t-il amèrement. Autrefois, il l'aurait prise dans ses bras, l'aurait laissée le frapper de ses petites mains délicates, il aurait emprisonné sa taille, ses mains l'auraient caressée, sa bouche aurait cherché ses lèvres pour faire taire ses faibles mots de protestations. Peut-être aurait-il alors glissé sa main entre ses jambes, ou l'aurait-il jetée sur le lit où elle serait tombée en soumission. Tout cela changerait son non offusqué en oui suppliant.
Il l'aurait prise et elle aurait pleuré de joie cette fois. Autrefois. Mais pas aujourd'hui. Sa lettre lui avait glacé le coeur et même s'il l'aimait et la désirait toujours autant il n'arrivait plus à le lui imposer. Il ne pouvait pas la forcer à l'aimer si elle disait en aimer un autre. Même s'il savait qu'elle l'aimait encore. Mais à quoi bon?

Un mari ça se trompe, on le connait, on l'aime tendrement, on y est attaché mais il a perdu le pouvoir de la nouveauté, un prétendant c'était une toute autre affaire, peu importe son statut son origine (il le haïssait déjà), il avait du pouvoir, de quoi séduire, mentir et éblouir.
Un autre amant que lui, plus présent, plus proche, plus réel donc qui lui enlevait son unicité à lui, sa place de roi dans ses yeux à elle et surtout dans son coeur. Il aurait dû se battre comme le font les coqs et les chiens mais il était trop digne pour ça, même pour elle. Il ne voulait pas être différent de celui qu'elle avait aimé. Elle lui avait dit qu'elle l'aimait encore et il n'avait pas compris. Elle l'aimait oui mais par défaut sans qu'il ait droit au chapitre. Elle aimait comme on aime une peinture et non ce qu'elle dépeint et encore moins l'artiste. Lui il l'aimait du désespoir car malgré tout ce qu'il avait dans la vie, il ne voulait qu'elle et quelqu'un la lui avait prise, non pire, elle s'était donnée. Un premier venu, un peu intelligent, très charmeur, un homme bon probablement si on avait confiance à son jugement mais un autre homme quand même. Il avait souffert quelque temps enfermé, décidé à vivre sans elle, à vivre malgré elle.
Mais il n'y arrivait pas vraiment, alors il était venu la voir.
Et là, ici, il comprenait enfin qu'elle avait mal, ou qu'elle avait eu mal et qu'elle avait une autre façon que lui de le vivre. Cela l'attrista et il grimaça. Sa main se portant instinctivement à son ventre et puis il sentit les larmes couler sans avoir eu le temps de les retenir mais malgré toutes ses envies de la supplier, de la tenir, de se fâcher et de la prendre là il ne fit rien. Il se força à sourire et dit "Je comprends, c'est probablement mieux ainsi". Il s'effaça lentement, regardant leur image se séparer dans le miroir plutôt que de sonder ses yeux, qu'elle avait comme lui, bleu gris, de peur d'y voir une lueur d'espoir, de désir. La porte se referma sans qu'il embrasse à nouveau cette bouche parfaite. La porte se referme et l'oubli prit le pas. L'oubli complet.

Je clignai des yeux, lentement d'abord, l'espace semblait s'agrandir autour de moi, l'air se rafraîchir, la lumière envahir ma vision, m'aveuglant comme le fait le soleil lorsqu'on viole une chambre de malade en ouvrant les rideaux. Je portai une main protectrice à mon visage, j'essayai à tout le moins. Mon bras resta mollement pendu à mon côté, inerte, alors que les sensations reprenaient droit sur mon corps. La douleur et les fourmis se répandaient à travers moi, je grimaçais. Ankylosé, je pris le temps de regarder alentours. Une forêt insondable, fraîche, presque froide, inextricable, enchevêtrée, le soleil ne perçant pas la frondaison. J'avais l'impression de sentir l'humus jusqu'ici car tout en elle respirait la putréfaction, la décadence.

Je toussai, sans trop savoir pourquoi, le soleil, la fraîcheur, le corps qui reprenait ses droits par une réaction instinctive et protestatrice.

Lentement mon regard se déporta vers sa droite, sur la plaine coulant entre moi et la forêt, moi sur ma souche, la plaine se cabrant au soleil et s'étirant dans le lointain, grimpant en colline douce où se creusait un chemin de terre brune. Là bas, la route, là se trouvait le destin, je le sentais car en haut de la colline se dessinait une innocente auberge croisée de colombages rassurants, humains, tout comme la fumée à peine perceptible qui paraissait hors de la maigre cheminée.
"Vous voilà enfin revenu dans le monde des vivants?" Je sursautai sur place, tentai de me retourner, en vain, les jambes encore endormies ne m'obéirent pas et je m'affalai mollement sur le côté dans l'herbe tel un pantin auquel on avait joué un mauvais tour et dont on s'était lassé.
Je ne me souvenais de rien, sauf de ce songe, de ce souvenir, cet amour qui me brûlait déjà les entrailles pour une femme dont je ne connaissais même pas le nom. Dont je ne connaissais rien sauf les cheveux, la bouche, les yeux, un corps que j'arrivais presque à sentir sous mes doigts. Mais le pire c'est que j'en savais encore moins sur moi-même. La panique me prit à la gorge. Ma mémoire avait été complètement effacée ce qui rendait la seule scène m'occupant l’esprit encore plus obsédante, plus réelle et capitale. Mon cœur s’emballait, je tentais encore de me relever en me frétillant mollement dans l’herbe. L’homme, car c’en était un, qui l’avait apostrophé s’approcha lentement, me toisant, curieux, la tête légèrement penchée se demandant probablement quel énergumène il avait alpagué là. Ses cheveux gris bouclé et en bataille semblait indiqué un âge avancé. Il semblait cependant porter une attention particulière à sa barbichette qui cernait des lèvres boudeuses. Il avait l’amabilité de ne pas se moquer et me tendit une main secoureuse.

Faiblement je me relevai, vacillant encore sur mes jambes douloureuses. « Désolé de vous avoir effrayé, vous êtes immobiles depuis hier au soir au moins. Une vraie curiosité pour la région. »
Ma gorge était trop sèche pour parler, je me contentai de répondre par un maigre sourire sur mes lèvres craquelées. J’émis une sorte de croac comique. Le vieil homme sourit : « Vous devez être affamé, venez avec moi à l’auberge, on vous requinquera. » Je souris encore, soulagé de retrouver un environnement humain, de la nourriture et de l’eau surtout. Dieu que j’avais soif.
Mais plus j’approchais et plus j’étais angoissé, effrayé. Il y’aurait des gens là bas. Peut-être même des personnes qui me connaissaient ou qui m’avait fait du mal. Car on m’en avait fait d’une manière ou d’une autre j’en étais certain. On n’attrape pas soudainement une perte de mémoire apathique en se promenant dans un champ. Je ne savais pas encore ce qu’on m’avait fait mais je ne voulais pas rencontrer les responsables. Je ralentis, tentait de me laisser distancer par mon jovial compagnon qui salivait déjà à l’idée d’un bon repas. Enfin, je m’arrêtai complètement. Je n’avais nulle part où aller, à part cette souche où tout avait commencé. « c’est comme si j’étais né aujourd’hui, déjà adulte ».
Le vieil homme me contemplait en silence alors je tentai de lui expliquer, les mots eurent du mal à sortir et comme je n’avais pas grand-chose à raconter je ne cachais rien. Je m’étais remis à marcher en parlant d’elle. Je comprenait, je pense, que j’avais envie, non besoin, de la revoir.
Et c’est donc devant un bouillon généreusement garni de viande que je fini d’expliquer le peu que je savais de moi –même. J’avais tellement parlé d’elle déjà que le vieil homme, Maître Tuvan, avait compris que j’en étais irrémédiablement amoureux.
- Voilà qui est bien singulier, car vous dites, je pense qu’elle a, pardonnez moi , les mêmes yeux que vous, d’un bleu profond. Hors vos yeux sont d’un brun des plus commun. Sans offense bien sûr. Nous essayons ici d’éclaircir un mystère et qui déjà me passionne. Etes vous certain de ne point vous raccrocher à un rêve ?.
Je me tâtais le visage instinctivement comme si je pouvais ainsi voir la couleur de mes yeux. Un sentiment de colère m'envahit. Qui était-il pour douter ainsi de mon amour? Je serrai les mâchoires et le poing, prêt à me lever et partir mais à nouveau je ne savais pas où aller et il faut bien l'avouer la peur de l'inconnu était très forte car tout m'étais inconnu. Je fini par avouer de mauvaise grâce que je n'en savais rien que seul mes sentiments, le besoin, le manque et la chaleur que je ressentais à sa pensée me convainquait de la véracité de mon unique souvenir.
Il hocha la tête "Vu que c'est la notre seule piste sur votre passé nous la suivrons donc." Je protestais faiblement à la fois rassuré et inquiet qu'il veuille m'accompagner. Il répondit qu'il ne pouvait passer à côté de l'occasion de venir en aide et étudier un être aussi singulier que moi.

Je me souvenais avoir eu un aperçu de mon image dans sa chambre à elle, brièvement lors de notre séparation dans ce miroir en pieds qui semblait se moquer. Mes yeux était bleus, mes traits fins, le nez un peu long, les cheveux bruns foncés tombant sur le front. Je demandais donc à notre hôte si elle ne disposait pas d'un miroir, cet ustensile couteux et frivole et heureusement c'était le cas pour sa plus luxueuse chambre qu'elle nous enjoint de ne salir sous aucun prétexte.
Mon choc fut rude car je n'étais tout simplement pas moi-même. Là où dans mon souvenir mes traits étaient allongés, fins, mes yeux bleus gris, mon regard torturé et sévère, ma bouche souriante. J'avais ici un air benêt, des traits plutôt ronds, un petit nez et des yeux bruns, les traits tirés par la fatigue. Ma première réaction instinctive fut évidemment de dire "Ce n'est pas moi" après tout ce n'était peut-être pas ma mémoire que l'on avait effacée mais mon corps qu'on avait changé.
Ce à quoi Maître Tuvan répondit: "Ah je proteste vous êtes bien vous, la question est de savoir si vos souvenirs sont réels et si oui, s'ils vous appartiennent car un corps est un corps, il n'apparait pas de nulle part monsieur, il se doit d'arriver à maturité en suivant les étapes de la vie, l'esprit c'est tout autre. Ce corps est à vous et vous l'avez eu toute votre vie, vous n'avez perdu que votre identité."
J'étais affalé sur le bord du lit qui ornait la pièce (avec un matelas! mais je n'en avais cure) plus richement décorée que les autres. Probablement pour les voyageurs à la bourse très remplie, bien plus que la mienne. Je m'étonnais d'ailleurs d'en avoir une.
"Je dirais que vous avez l'air d'un marchant ou d'un artisan mais pas d'un noble. Hors le milieu que vous avez décrit est clairement au dessus de votre mode de vie et du mien d'ailleurs. Il n'est pas impossible qu'une noble s'amourache à un pauvre bougre mais pas au point de vouloir faire sa vie avec lui et encore moins de le pouvoir hors c'est bien ce que vous sembliez espérer. J'ai bien peur que ce ne soit tout simplement pas vos souvenirs. Que les vôtres ont été supplantés par cet ersatz de la vie d'un autre, volontairement ou pas. Personnellement, je pense que l'on vous a utilisé, qu'on vous a soit volé vos souvenirs et que ce sont là les traces d'effractions ou qu'on a voulu se débarrasser de souvenirs compromettants pour une raison ou une autre."
Je protestais faiblement "Mais...je l'aime".
"O, ça je n'en doute pas, en temps normal j'essayerai de vous conseiller de l'oublier dans les bras d'une autre mais dans ce cas précis ce serait cruel car il ne vous resterait rien de votre passé. De plus je crains fort que ça ne marcherait pas vous êtes tellement accroché à ce souvenir que cela pourrait bien vous tuer de l'oublier. L'amour est ici quelque chose de tellement rassurant pour vous, vous vous êtes accaparé la seule chose que vous pouviez et il est maintenant trop tard. Une fois que le poison est dans le corps on ne peut qu'y survivre et non l'extraire."
- Je ne veux pas qu'on l'extraie, ce n'est pas un poison! Je répondit, têtu.
"O c'en est bien un, le manque va doucement vous ronger de l'intérieur, un trou béant vous habitera jour et nuit sans jamais plus vous quitter. Les douces pensées à son sujet pourront rendre toute autre chose insipide, indigne d'intérêt. Bref vous voilà ensorcelé par quelqu'un qui ne l'a probablement même pas demandé et qui ne vous connait pas.
Je murmurai un faible "je ne sais pas" Que savais-je en effet de la vie moi qui avait tout oublié?
"Personne ne sait" répondit-il compatissant "Voilà ce qui vous rends si intéressant, vous avez si peu de certitudes, d'opinions pré faites. Je suis sûr que malgré mon érudition je pourrais apprendre beaucoup de vous. Un homme sur lequel les habitudes et les coutumes n'ont pas eu prise, c'est inespéré."
Je haussais les épaules sans trop savoir que dire. Nous parlâmes encore un peu mais j'étais fatigué par toutes ses émotions qui m'avait envahie et bousculé aujourd'hui.
Nous louâmes donc une chambre et je m'y affalai rapidement dans un sommeil profond. Dans mon rêve, elle s'éloignait sans cesse et maître Tuvan me répétait sans cesse en me tirant par la manche "Ce n'est qu'un rêve, ce n'est qu'un rêve". Je voulais l'appeler par son nom mais je ne le connaissais pas. Je voulais lui dire "C'est moi!" mais elle ne me connaissait pas. Je ne pouvais même pas lui dire qui j'étais moi-même. Et cela faisait rire maître Tuvan, il riait, riait et j'entendis encore son rire lorsque j'ouvris les yeux en sueur. J'étais courbaturé et j'avais l'impression d'être encore plus fatigué que la veille. Nous partîmes tard dans la journée, le soleil était haut dans le ciel. Cela ne semblait pas inquiéter mon compagnon qui m'avait-il dit, avait l'habitude de parcourir le monde, de marcher longuement et de dormir à même le sol. Je lui étais donc reconnaissant de m'avoir laissé dormir. Lorsque je lui demandais où nous allions il me répondit. "Loin d'ici, vous n'en avez pas l'accent".