A few thoughts, a few sayings

-"Je suis celui qui te connais quand tu fuis jusqu'au bout du monde" Jacques Bertin (Je suis celui qui court)

- "Je ne suis pour toi qu'un renard semblable à cent mille renards. Mais, si tu m'apprivoises, nous aurons besoin l'un de l'autre. Tu seras pour moi unique au monde. Je serai pour toi unique au monde..." Saint-Exupéry (Petit Prince)

- "Et le plus beau, tu m'as trahi. Mais tu ne m'en as pas voulu" Reggiani (Le Vieux Couple)

- "We all got holes to fill And them holes are all that's real" Townes Van Zandt (To Live is To Fly)

- "Et de vivre, il s'en fout, sa vie de lui s'éloigne... Tu marches dans la rue, tu t'en fous, tu te moques, de toi, de tout, de rien, de ta vie qui s'en va." Jacques Bertin (Je parle pour celui qui a manqué le train)

- "I thought that you'd want what I want. Sorry my dear." Stephen Sondheim (Send in the clowns)

- "Pauvre, je suis de ma jeunesse, De pauvre et de petite extrace. Mon père jamais n'eu grand richesse, Ni son aïeul nommé Orace. Pauvreté nous suit à la trace, sur les tombeaux de mes ancêtres, Les âmes desquels Dieu embrasse! On n'y voit ni couronnes ni sceptres." François Villon (Pauvre, je suis)

- "Vous êtes prêts à tout obéir, tuer, croire. Des comme vous le siècle en a plein ses tiroirs. On vous solde à la pelle et c'est fort bien vendu" Aragon (Ce qu'il m'aura fallu de temps pour tout comprendre)

- "And honey I miss you and I'm being good and I'd love to be with you if only I could" Bobby Russell (Honey)

- "And I need a good woman, to make me feel like a good man should. I'm not saying I am a good man Oh but I would be if I could" Fleetwood Mac (Man of the World)

- "Je ne comprends pas ces gens qui peuvent s'installer n'importe où quand je cherche inlassablement avec la tête fermée que tu connais l'endroit où je retrouverai mon enfance" Jacques Bertin (Colline)

jeudi, janvier 13, 2011

La Nostalgie du Tyran, version 3 - Chapitre 1: La Vague Aveugle

Troisième essai, le bon cette fois peut-être. Il faut y croire :).
Je mélange donc deux histoires qui me turlipinent depuis un bail, chemin vers pensée et la nostalgie du tyran mais je pense qu'elles se marieront bien, on verra.
C'est un premier jet qui reprends des morceaux que j'avais déjà écris mais qui en grande partie est réécrit from scratch.

principale musique d'inspiration: Corvus Corax - Florent Omnes


Lentement une feuille tourbillonnait vers le sol, des goutes rouges de rosée glissaient le long de la surface lisse que la lumière caressait. Son regard la suivit jusqu’au sol où elle se posa lentement dans la main ouverte et pâle d’un cadavre. Il se sentit glacé, la peur se répandit en lui. Où était-il ? Le bruit, l’odeur de mort, de sueur et de boyaux vidés. Ses yeux s’abaissèrent lentement vers son propre corps, ses mains vides mais couvertes de sang et de terre fraiche. Il sut qu’il était tombé à genou, il sentait l’humidité qui lentement passait au travers de ses chausses. Où peut-être était-ce la pluie, il venait à peine de réaliser qu’elle tombait. Des petites rigoles remplies de sang se frayaient un chemin dans la boue. Et partout, aussi loin qu’il pouvait voir des cadavres.Lentement le bruit rempli l’espace, les combats n’étaient pas finis. Il marcha lentement, difficilement comme s’il n’avait plus bougé depuis des heures, ses membres endoloris lui faisaient mal.

Il approchait de la lisière des bois et le bruit grandissait, grondait : des râles, des cris, le claquement de fouets, des voix des centaines de milliers de voix qui scandaient en chœur ou en désordre, priaient, hurlaient sans s’entendre. Il cligna des yeux, encore et encore, chassant la pluie, les pleurs, pourquoi pleurait-il ? Enfin il put distinguer ce qui jusqu’alors ne formait qu’un mur pale à l’horizon. Une marée humaine monstrueuse qui avançait inexorablement, une vague à perte de vue de créatures torturées, nues, aveugles, les yeux d’un blanc laiteux grands ouverts sur le ciel remplis de nuages menaçants, la bouche ouverte sur leurs supplications. Ils boitaient enchainés les uns aux autres par un crochet planté dans la chair, dans l’os. Ouvrant des blessures infectées, noires, grouillantes de vers et de mouches. Certains pourrissaient debout, d’autre mourraient avant, étaient trainés malgré tout par les autres jusqu’à ce qu’ils ne restent plus rien d’eux que ce crochet rouillé, noir de sang caillé. Ils avançaient à tâtons, se bousculant les uns les autres, et derrière claquait les fouets de leurs maitres. Aveugles eux aussi dont le seul et unique but n’était plus que de frapper devant eux en un rythme connu d’eux seul comme si c’était là leur dernière, leur seule raison de vivre. Il fut pétrifié par ce paysage de cauchemar, cette marée humaine blafarde qui taillait en pièce les dernières poches de résistances qui se tenaient encore sur son chemin. De maigres groupes d’hommes, bardés de lances sur lesquels s’empalaient les aveugles. Entrainant les piques dans leur chute, continuant à frapper l’air puis le sol tout en priant et en râlant de douleur. D’autres les piétinaient et mourraient à leur suite jusqu’à ce qu’il n’y ai plus rien face à eux.

Ils s’approchèrent frappant et psalmodiant de la lisière des arbres, vers lui, lui, toujours pétrifié d’horreur, les jambes de coton, les chausses mouillées.

Les formes continuaient à battre l’air, attaquant même les branchages et les troncs d’arbres, les réduisant en copeaux de bois, l’esprit absent, submergé par la douleur et la folie, obnubilés par les prières scandées « Maeror abit scaebilus » Une main parcheminée lui attrapa le bras, le secoua violemment « Courez monsieur ! Fuyez ils n’ont aucune pitié, le jour est perdu, il l’a toujours été » L’homme cracha à ses pieds, le regard apeuré malgré le poids des années qui faisaient de lui un vétéran. Il n’attendit pas de réponse et s’enfonça plus profondément dans les bois. Il le regarda disparaître parmi le vert sombre de la foret. La vague aveugle se rapprochait inexorablement, s’enfonçait dans les sous-bois. Il aperçut derrière elle des hommes qui la guidait à cheval, criant des ordres, frappant les pauvres hères, et parfois courant derrière un fuyard, un homme qui avait pu pouvoir y réchapper en faisant le mort ou en courant. Il était temps de partir, il ne sut jamais pourquoi malgré la peur il avait attendu si longtemps à contempler la mort, sa mort, avancer. Mais il finit enfin par tourner les talons et fuit par là où il avait vu l’autre homme partir.

Il courut et courut encore, ses premiers pas hésitants, manquant de trébucher, ses mains se rattrapant à l’écorce des arbres, s’écorchant la peau. Mais il accueillait avec bienveillance ce picotement, le sang qui pulsait dans ses doigts qui lui rappelait qu’il était encore en vie, il redoubla d’ardeur malgré les muscles qui le brulaient. Il aurait presque rit d’allégresse de se sentir vivant car il ne savait pas d’où il venait, ne savait pas qui il était et son esprit fit le vide sur la seule chose qu’il savait de son passé. Bercé par la clameur des hommes sans visages et de leur prières qui s’éloignait doucement.

...Elle avait les cheveux bruns, tirant vers le roux, la taille fine. Il avait déjà envie d'elle alors qu'il venait à peine d'entrer dans la pièce. Son membre se tendait contre ses chausses. Son être entier semble ainsi s'étirer vers elle, chercher à l'atteindre plus vite. Il ferma la porte et attendit à l'entrée. Il avait besoin de la toucher, cela faisait si longtemps. Elle crispa ses épaules lorsqu'elle l'entendit, elle savait que c'était lui. Elle avait toujours eu ce don pour le sentir, le lire comme s'il était transparent pour elle. Cela l'avait désarçonné au début, lui qui se trouvait si malin, si secret.
Il ouvrit la bouche pour murmurer son nom, sa main se leva lentement, anticipant la caresse qu'il lui donnait déjà en songe. Mais elle se tourna brusquement, brisant le rêve éveillé, le ramenant à la triste réalité.

"Vas-t-en, tu ne comprends donc pas? Je n’en peux plus de ton amour, de ta douleur." Elle se jeta sur lui, ses yeux rougis par les pleurs. Depuis qu'elle sait que je vais venir pensa-t-il amèrement. Autrefois, il l'aurait prise dans ses bras, l'aurait laissée le frapper de ses petites mains délicates, il aurait emprisonné sa taille, ses mains l'auraient caressée, sa bouche aurait cherché ses lèvres pour faire taire ses faibles mots de protestations. Peut-être aurait-il alors glissé sa main entre ses jambes, ou l'aurait-il jetée sur le lit où elle serait tombée en soumission. Tout cela changerait son non offusqué en oui suppliant.
Il l'aurait prise et elle aurait pleuré, de joie cette fois. Autrefois. Mais pas aujourd'hui. Sa lettre lui avait glacé le cœur et même s'il l'aimait et la désirait toujours autant il n'arrivait plus à le lui imposer. Il ne pouvait pas la forcer à l'aimer si elle disait en aimer un autre. Même s'il savait qu'elle l'aimait encore. Mais à quoi bon?

Un mari ça se trompe, on le connait, on l'aime tendrement, on y est attaché mais il a perdu le pouvoir de la nouveauté, un prétendant c'était une toute autre affaire, peu importe son statut son origine (il le haïssait déjà), il avait du pouvoir, de quoi séduire, mentir et éblouir.

Un autre amant que lui, plus présent, plus proche, plus réel donc qui lui enlevait son unicité à lui, sa place de roi dans ses yeux à elle et surtout dans son cœur. Il aurait dû se battre comme le font les coqs et les chiens mais il était trop digne pour ça, même pour elle. Il ne voulait pas être différent de celui qu'elle avait aimé. Elle lui avait dit qu'elle l'aimait encore et il n'avait pas compris. Elle l'aimait oui mais par défaut sans qu'il ait droit au chapitre. Elle aimait comme on aime une peinture et non ce qu'elle dépeint et encore moins l'artiste. Lui il l'aimait du désespoir car malgré tout ce qu'il avait dans la vie, il ne voulait qu'elle et quelqu'un la lui avait prise, non pire, elle s'était donnée. Un premier venu, un peu intelligent, très charmeur, un homme bon probablement si on avait confiance à son jugement mais un autre homme quand même. Il avait souffert quelque temps enfermé, décidé à vivre sans elle, à vivre malgré elle.
Mais il n'y arrivait pas vraiment, alors il était venu la voir.

Et là, ici, il comprenait enfin qu'elle avait mal, ou qu'elle avait eu mal et qu'elle avait une autre façon que lui de le vivre. Cela l'attrista et il grimaça. Sa main se portant instinctivement à son ventre et puis il sentit les larmes couler sans avoir eu le temps de les retenir mais malgré toutes ses envies de la supplier, de la tenir, de se fâcher et de la prendre là il ne fit rien. Il se força à sourire et dit "Je comprends, c'est probablement mieux ainsi. Je t’aime Amélia, prends soin de toi.". Il s'effaça lentement, regardant leur image se séparer dans le miroir plutôt que de sonder ses yeux, qu'elle avait comme lui, bleu gris, de peur d'y voir une lueur d'espoir, de désir. La porte se referma sans qu'il embrasse à nouveau cette bouche parfaite. La porte se referme et l'oubli prit le pas. Seul le martèlement de ses jambes comptait. Qui était-elle ? Qui était-il ? Il ne le savait pas et les larmes continuaient de couler, la douleur de ses muscles se mêlant à celle du coeur, il aurait voulu courir ainsi jusqu’au bout du monde s’il y’en avait un.