A few thoughts, a few sayings

-"Je suis celui qui te connais quand tu fuis jusqu'au bout du monde" Jacques Bertin (Je suis celui qui court)

- "Je ne suis pour toi qu'un renard semblable à cent mille renards. Mais, si tu m'apprivoises, nous aurons besoin l'un de l'autre. Tu seras pour moi unique au monde. Je serai pour toi unique au monde..." Saint-Exupéry (Petit Prince)

- "Et le plus beau, tu m'as trahi. Mais tu ne m'en as pas voulu" Reggiani (Le Vieux Couple)

- "We all got holes to fill And them holes are all that's real" Townes Van Zandt (To Live is To Fly)

- "Et de vivre, il s'en fout, sa vie de lui s'éloigne... Tu marches dans la rue, tu t'en fous, tu te moques, de toi, de tout, de rien, de ta vie qui s'en va." Jacques Bertin (Je parle pour celui qui a manqué le train)

- "I thought that you'd want what I want. Sorry my dear." Stephen Sondheim (Send in the clowns)

- "Pauvre, je suis de ma jeunesse, De pauvre et de petite extrace. Mon père jamais n'eu grand richesse, Ni son aïeul nommé Orace. Pauvreté nous suit à la trace, sur les tombeaux de mes ancêtres, Les âmes desquels Dieu embrasse! On n'y voit ni couronnes ni sceptres." François Villon (Pauvre, je suis)

- "Vous êtes prêts à tout obéir, tuer, croire. Des comme vous le siècle en a plein ses tiroirs. On vous solde à la pelle et c'est fort bien vendu" Aragon (Ce qu'il m'aura fallu de temps pour tout comprendre)

- "And honey I miss you and I'm being good and I'd love to be with you if only I could" Bobby Russell (Honey)

- "And I need a good woman, to make me feel like a good man should. I'm not saying I am a good man Oh but I would be if I could" Fleetwood Mac (Man of the World)

- "Je ne comprends pas ces gens qui peuvent s'installer n'importe où quand je cherche inlassablement avec la tête fermée que tu connais l'endroit où je retrouverai mon enfance" Jacques Bertin (Colline)

samedi, septembre 15, 2007

Le Vengeur - Chapitre 21. Arnulf - Guet-apens

Enfin! Depuis le temps que je voulais l'écrire celui-là. :)
Un chapitre important je pense, un chapitre dont la musique me trottait dans la tête depuis des mois. Un chapitre dont j'ai eu peur d'oublier l'essence. J'espère qu'il est aussi frais ici que lorsque je l'ai pensé le premier jour. Une étape importante quoi qu'il en soit, tout ce qui a été écrit avant devait cadrer pour que ceci arrive, c'était un passage obligatoire pour moi, je voulais ce combat.
Il est un peu plus court que ce que je m'étais imaginé mais je verrai bien à la relecture ce que ça donne vraiment.
Bonne lecture.

Musique d'inspiration: Corvus Corax - Venus Vina Musica

Chapitre XXI. Arnulf « Lapin-Tordu » - Guet-apens

Les hautes herbes remplissaient la plaine. Elles se couvraient de la rosée du matin, pourtant cela faisait des heures que les Burgans étaient en route. La brume commençait enfin à se lever mais on n’arrivait pas encore à apercevoir les dents des dieux pourtant si proches. Arnulf fit un signe de tête à Alwin, celle-ci partit en courant, le dos courbé battant la terre de ses pieds nus. Il se demanda comment elle faisait pour ne pas grelotter de froid. Il savait qu’il n’aurait pas à prévenir le gosse, celui-ci avait un sixième sens pour ce genre de chose. Gosse, Arnulf pouffa. Ce gamin avait plus de maturité que la plupart des hommes et il arrivait à clouer le bec à Irkan en personne, la tribu des Serpents était décidément bien étrange. Les autres tribus étaient encore coincées dans les montagnes. Les neiges avaient mis du temps à fondre cette année et c’est seulement grâce aux Béliers, maintenant sous ses ordres qu’ils avaient pu traverser sans encombre. La connaissance des montagnes de ceux-ci ne suffisait cependant pas à faire passer des rhinocéros au travers d’un col enneigés.
Les Lions étaient accroupis près de lui. La plupart la main sur leurs instruments pour leur éviter de faire le moindre bruit. Il ne voyait personne d’autre. Ah si ! Enfin il aperçut les premiers cavaliers.
- Eclaireurs. murmura-t’il.
Ses hommes reprirent l’information et la passèrent aux autres.
Il allait falloir jouer serré. Les hommes se déplacèrent pas à pas pour éviter de se retrouver dans le chemin des cavaliers. Ceux-ci avançaient avec précaution, on ne voyait pas à dix mètres. Mais eux étaient visibles de plus loin. « Prétentieux, ils n’apprendront donc jamais ? » pensa Arnulf. Malgré les fourrures et l’accoutrement hivernal ils avaient gardés la cape rouge, le grand bouclier rond et surtout le casque panaché, fourbis d’une longue crête peinte en rouge. Même les jambières reflétaient la lumière de suffisamment loin pour prévoir leurs mouvements.
Les Burgans attendirent, les éclaireurs passant parfois à moins de cinq mètres d’un groupe de guerrier mais ils regardaient au loin, pas à leurs pieds. Le soleil commençait à poindre ses rayons, tentant de disperser la brume, en vain. « Pour l’instant ».
Mais ils n’eurent pas à attendre beaucoup plus longtemps, le gros de la troupe arrivait. Ils marchaient en colonne, la lance sur l’épaule, le bouclier harnaché dans le dos. Arnulf eut un sourire mauvais, son cœur se mit à battre plus fort. L’ennemi, enfin !
Les soldats de fer ne semblaient pas très enthousiastes. Ils avaient froid et beaucoup avait les épaules voûtées ou toussaient. Arnulf se demanda pourquoi il s’était inquiété quand on lui avait annoncé la colonne,
- On les entendrait à trois kilomètres. Chuchota-t’il.
Le guerrier à côté de lui ouvrit sa bouche dans un sourire carnassier.
Rien que leur façon de marcher en rythme faisait vibrer le sol bien avant qu’on puisse les apercevoir.
Il attendit que la plus grosse partie des troupes soit passées. Enfin, il se releva doucement en sortant sa hache de la peau qui la protégeait de l’humidité. Il donna un signe de tête à son voisin qui prépara sa corne, inspira un grand coup et souffla dedans trois longs coups. Arnulf se mit à courir vers l’ennemi en criant « LIOOOONS ». Il entendit un autre cri se répercuter « PANTHERES » et les éclaireurs tombèrent tous en même temps, les chevaux s’écroulant avec eux, disparaissant dans les herbes. Arnulf courait en grandes enjambées, sautait les mottes de terres et levait haut sa hache. Son autre main tambourinait sur ton petit tambour. Des centaines de guerriers faisaient la même chose donnant l’impression qu’ils étaient des milliers. L’ennemi se figea. Certains restèrent là interdit, d’autres pointèrent la lance dans leur direction. Arnulf se mit à chanter et fut reprit par ses hommes.
Un cri s’éleva de la colonne de soldats. Ils commencèrent à faire un mur de bouclier. « Trop tard » pensa Arnulf en voyant l’ordre qui mettait du temps à passer, certains hommes qui n’arrivaient pas à se dépêtrer de la lanière de cuir qui retenait leur bouclier dans le dos. Encore dix pas. « TAUREAUX » le cri retentit devant lui de l’autre côté de l’ennemi. Il crut entendre le ralliement « ..EERPENTS » à droite alors que les autres tribus se relevaient, semant la confusion et la peur, leurs instruments se mêlant aux autres. Certains hommes qui attendaient la charge des lions se retournèrent. Des bleus probablement. Arnulf et ses hommes continuaient de courir droit sur les lances ennemies.
Les hommes de fer n’avaient jamais compris une chose, les Burgans n’avait pas besoin d’être au corps à corps pour frapper. A trois pas, Arnulf leva son bras aussi haut qu’il le pouvait et lança sa hache de toutes ses forces. Elle se planta dans le bouclier devant lui, le poids de l’arme fit reculer l’homme qui abaissa lance et bouclier. Arnulf sourit en dégainant sa grande épée de son dos. Il était temps pour lui de faire jouer une autre musique. Au loin les anciens et les infirmes s’occupaient de maintenir l’hymne guerrier en frappant sur de lourds tambours aussi vite qu’ils le pouvaient.
Arnulf sauta et se jeta épaule en avant sur le mur de bouclier. Les hommes tentèrent de relever leur lance mais il sauta par-dessus et les percuta de plein fouet créant une première brèche dans leur ligne. Il n’eut pas le temps de se relever qu’il put voir que le combat faisait déjà rage autour de lui. Des hommes de fer s’écroulaient. Certaines avaient le crâne ouvert par une hache car ils n’avaient pas eu le réflexe de se protéger le visage. D’autres avaient reçu un coup d’épée dans la nuque car le poids des haches burgannes les avait fait s’agenouiller. Il se mit à genoux, achevant un soldat sous lui d’un coup de coude dans la nuque. Une panthère passa au dessus de lui et arracha le visage d’un soldat qui allait l’empaler. « Alwin ». Arnulf sourit, elle avait enfin lâché ses joujoux. Aujourd’hui était un beau jour, le sang coulait sur la terre Verion allait être heureuse. Il continua de chanter en frappant de droite et de gauche. Ses coups étaient tellement puissants qu’il fracassa plus d’un bouclier en cassant le bras qui le soutenait. Sa force était tellement spectaculaire qu’il pouvait attraper un homme d’une main et le lancer sur ses compagnons tout en tranchant la jambe d’un autre à sa droite. Ses hommes n’étaient pas en reste. Les soldats de fer flanchèrent, reculèrent, tentèrent de se reformer et puis ils reçurent la charge des taureaux. Arnulf vit des hommes projeté dans les airs et se demanda s’il ne combattait pas aux côtés de vrais taureaux.
Des poches de résistances se formaient, la colonne était brisée. Des dards tombèrent du ciel se plantant dans le cou et dans l’arrière des jambes des soldats paniqués. Les Serpents étaient à l’œuvre, à peine effleurés, les hommes s’écroulaient, empoisonnés. Et le soleil se leva enfin. Il illumina la lame rougie de sang d’Arnulf alors qu’il la faisait tournoyer au dessus de sa tête, pliant les genoux il faucha la tête de deux soldats qui s’approchaient trop, leur ouvrant la mâchoire, le fer de leur casques s’enfonçait dans les chairs avant de laisser passer l’épée qui ressortait de l’autre côté dans une gerbe de sang. Il cria de plaisir faisant jouer ses muscles.
Il voyait les hommes tomber, parfois c’était des visages qu’il connaissait mais souvent c’était la tête d’un homme au teint pâle, le regard surpris et emprisonné dans un casque au panache ridicule.
Des cris se faisaient entendre parmi les rangs ennemis. Un homme tentait de les rallier, son armure blanche scintillant sous le soleil.
Un frisson glacé parcourut Arnulf. Il poussa un soldat ennemi, passant à côté de lui sans même le tuer. « NOON ! Arrêtez ! » criait-il en courant vers l’homme maintenant encerclé. Mais les tambours, les chants et le bruit des combats empêchaient les Burgans de l’entendre.
Il courut le plus vite qu’il put en évitant les ennemis, les lames amies qui tournoyaient, les cadavres et les lances tombées au sol. Les larmes coulaient dans sa barbe alors qu’il criait « NON NON LAISSEZ LE ! » Ce devait être un jour merveilleux, ce devait être le début de sa quête pas la fin. Quel tour lui jouait les dieux ?
Le chevalier scintillant faisait tourner son cheval, une bête magnifique, il frappait à gauche et à droite, son épée flamboyait à une vitesse folle, son bouclier en forme de lierre arrêtait les coups les plus vicieux. Bientôt il fut seul au milieu des Burgans mais il ne faiblissait pas. Arnulf reprit espoir, plus que quelques mètres et il pourrait arrêter cette folie. Et puis l’homme fut tiré à bas par des bras puissants qui agrippaient ses genouillères en forme de serpent. Arnulf cria encore, de rage, il ne voyait plus rien d’autre que l’homme qui tombait doucement de cheval, comme dans un cauchemar. L’animal se cabra, écrasant de ses fers le visage d’un Taureau tentant de dégager un chemin pour son maître. Un amas de corps, de bras et d’armes s’agglutina sur le chevalier et Arnulf ne vit plus que les haches qui s’abattaient sur lui. Encore et Encore ! Elles devenaient rouges et le sang volait accompagné de morceaux d’armure blanche qui scintillaient sous le soleil. Il n’y avait plus une seule trace de brume dans le ciel.
Arnulf tomba à genoux, un non plaintif sur les lèvres. Il se mit à pleurer. Il avait échoué. Il avait eu l’esprit embrumé par la soif de sang. La scène sous ses yeux lui apparaissait maintenant comme une abomination. Comment avait-il pu croire que la guerre était une affaire d’honneur ? Les morceaux de corps, les ventres ouverts, les hommes (et femmes nota-t-il en voyant une cousine d’Alwin clouée au sol par une lance) tombés amis ou ennemis, tout ça faisait partie d’un cauchemar et non d’un rêve de gloire. Le rêve c’était la vie, celle qui l’attendait au village dans le ventre de sa femme. Ses épaules étaient secouées de soubresauts. Il avait failli à son peuple tout ça pour une gloriole personnelle, tout ça parce que comme son père, il voulait marquer l’histoire burgannes.
Oh ! Il l’avait marquée, il venait juste d’assister à la fin de son peuple et c’était lui qui l’avait précipitée. Ses hommes le regardaient interdits. Les plus anciens semblaient comprendre, attribuant ses pleurs à la douleur d’avoir abattu un ennemi honorable mais ils ne savaient pas. Personne ne savait qu’il devait trouver le chevalier scintillant, pourquoi n'avait-il pas prévenu les autres ?
Trop fier encore, il avait voulu garder la parole des dieux pour lui seul. Il leva les poings aux cieux et cria sa colère.
Alwin s’était approchée, inquiète, doucement elle lui posa une main sur l’épaule. Il ne la sentit pas, il se leva et avança vers les restes du chevalier blanc. Etrangement son cheval restait près de son corps, il n’avait même pas été blessé. Les burgans ne frappaient pas les bêtes quand ils pouvaient l’éviter. L’animal renâcla lorsqu’il voulut approcher, il se tenait au dessus du corps de son maître. Arnulf tendit les mains en avant dans un geste apaisant et s’avança doucement. L’équidé se calma et recula pour lui permettre de voir le carnage, Arnulf aurait presque juré voir une larme dans ses yeux bruns mais sa vue était tellement brouillée qu’il s’essuya le visage d’un revers de manche avant d’examiner le corps. En fait l’armure, bien que cabossée, avait résisté à la plupart des coups, mais le visage lui était réduit en charpie. Pourquoi ne portait-il pas de casque ? Cela l’aurait peut être sauvé ? Arnulf faillit maudire l’homme pour son imprudence mais se ravisa tellement il était stupide de vouloir maudire les morts de n’avoir pas pu éviter de mourir. Il s’agenouilla, prit la main gantée de l’homme et se mit à chanter.
Arnulf chantait là un chant qu’on entendait peu, le chant des héros morts au combat.
Et malgré leur surprise, malgré leurs doutes, aucun burgans ne refusa se chant à l’homme qui s’était si bien battu aujourd’hui.
Le soleil était haut dans le ciel lorsqu’ils s’arrêtèrent de chanter. Des chariots avaient été amenés. On y posait les corps des Burgans défunts, ceux-ci seraient renvoyés vers leur terre natale.
Après hésitation Arnulf décida de ramasser celui du chevalier scintillant aussi. Il l’enterrerait devant sa maison et y prierait chaque matin jusqu’à la fin. Un lion ne fuyait pas la honte. Il espérait juste qu’il aurait le temps de voir ses enfants grandir avant que son peuple ne disparaisse.

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