A few thoughts, a few sayings

-"Je suis celui qui te connais quand tu fuis jusqu'au bout du monde" Jacques Bertin (Je suis celui qui court)

- "Je ne suis pour toi qu'un renard semblable à cent mille renards. Mais, si tu m'apprivoises, nous aurons besoin l'un de l'autre. Tu seras pour moi unique au monde. Je serai pour toi unique au monde..." Saint-Exupéry (Petit Prince)

- "Et le plus beau, tu m'as trahi. Mais tu ne m'en as pas voulu" Reggiani (Le Vieux Couple)

- "We all got holes to fill And them holes are all that's real" Townes Van Zandt (To Live is To Fly)

- "Et de vivre, il s'en fout, sa vie de lui s'éloigne... Tu marches dans la rue, tu t'en fous, tu te moques, de toi, de tout, de rien, de ta vie qui s'en va." Jacques Bertin (Je parle pour celui qui a manqué le train)

- "I thought that you'd want what I want. Sorry my dear." Stephen Sondheim (Send in the clowns)

- "Pauvre, je suis de ma jeunesse, De pauvre et de petite extrace. Mon père jamais n'eu grand richesse, Ni son aïeul nommé Orace. Pauvreté nous suit à la trace, sur les tombeaux de mes ancêtres, Les âmes desquels Dieu embrasse! On n'y voit ni couronnes ni sceptres." François Villon (Pauvre, je suis)

- "Vous êtes prêts à tout obéir, tuer, croire. Des comme vous le siècle en a plein ses tiroirs. On vous solde à la pelle et c'est fort bien vendu" Aragon (Ce qu'il m'aura fallu de temps pour tout comprendre)

- "And honey I miss you and I'm being good and I'd love to be with you if only I could" Bobby Russell (Honey)

- "And I need a good woman, to make me feel like a good man should. I'm not saying I am a good man Oh but I would be if I could" Fleetwood Mac (Man of the World)

- "Je ne comprends pas ces gens qui peuvent s'installer n'importe où quand je cherche inlassablement avec la tête fermée que tu connais l'endroit où je retrouverai mon enfance" Jacques Bertin (Colline)

lundi, avril 16, 2007

Le Vengeur - Chapitre 2. Thibaut

Voici le deuxième chapitre de mon histoire "Le Vengeur", étrangement et malgré que l'idée de base me soit venue il y'a longtemps déjà, il m'a fallu énormément de temps pour finir ce chapitre.
C'est seulement après avoir appréhendé le chapitre complètement différemment que j'en suis arrivé à bout.

Je ne suis pas encore parfaitement content du chapitre mais l'idée est là et le reste se fera au fil des relectures.

Edit: première relecture terminée, c'est un peu plus lisible, il faut maintenant laisser mûrir un peu l'histoire pour voir si elle prends ;).
Edit 2: j'ai terminé une deuxième relecture mais elle n'apparaît pas ici. Je suis encore assez mécontent du chapitre et je vais attendre de le travailler un peu plus avant de le mettre à jour sur le blog.

Thibaut


Son cheval s'ébrouait sous lui et piaffait d'impatience. Thibaut resserra ses mains moites sur sa lance. A seize ans, il était plus que temps pour Thibaut de se lancer dans son premier tournoi. Son père lui avait fait faire sa première armure sur mesure il y a un mois à peine. Il n’était toujours pas habitué à son poids et au manque de mobilité à cheval. Il savait aussi que s'il tombait il ne se relèverait pas, l'armure était bien trop lourde pour lui. Avec l'insouciance de la jeunesse, il ne comptait pas tomber. Il s'était entraîné et entraîné, encore et encore, jusqu'à être meurtris par l'armure. Son adversaire n'était pas le plus grand des chevaliers non plus. Il portait un casque argenté orné d’un cygne blanc, ailes déployées. Thibaut n’avait pas peur. En fait, celui-ci se forçait à voir ce même mannequin d'entraînement qu'il avait réduit en bouillie à force de charges.

Ce n’est pas tous les jours qu’un tournoi était organisé à Montfaucon alors aujourd'hui Thibaut ferait honneur à sa famille. Le faucon ne ferait qu'une bouchée du cygne!
Ce même faucon pesait lourd sur son casque comme s'il était impatient de s'élancer vers sa proie. Aujourd'hui, Thibaut Montfaucon pulvériserait son adversaire Mélard de Swanec !
- Echraze-le Tsibaut! lui souffla son petit frère Sorj qui lui servait d'écuyer.
- Tiens-toi prêt avec une autre lance ! lui intima Thibaut d'un ton sec.
Sa voix, amplifiée par le casque, lui parut trop forte et il eut l’impression que les gens le regardaient les sourcils froncés. Ne voyant pas grand chose des tribunes, il décida de reporter son attention sur son adversaire. Tous deux attendaient le signal du prince Sigmund qui trônait dans la tribune d'honneur.

Le prince royal, Sigmund Forcefer était en pleine tournée des vassaux du Sud. C’était une sorte de rituel qui permettait aux populations de découvrir leur futur roi. Montfaucon, de par son prestige, avait eu droit à la première visite.
Bien sûr tout ceci avait été annoncé il y'a plusieurs mois. Le prince lui ne s'était mis en route que le mois passé avec tout ses suivants et il n'était arrivé qu'hier. Apparemment les jouvenceaux, courtisans et autres godelureaux avaient fait fort de rendre le voyage du prince le plus plaisant possible. Fêtes, beuveries et filles de joies accompagnaient celui-ci depuis son départ de ma capitale. Apparemment, tous les nobles présents tentaient de gagner quelque faveur en chemin. Le prince était un garçon de vingt ans à peine qui était bien trop bedonnant pour faire honneur à son nom.
Son père, le roi Kylios le sec, lui était un vrai Forcefer, droit et dur. Juste, parait-il. Assez juste, en tout cas, pour que la paix règne depuis son ascension au trône voilà trente-cinq ans.
Thibaut connaissait sa leçon: Sigmund Forcefer, fils de Kylios Forcefer, dit le sec, et frère de la belle Orlamund, La famille Forcefer était issue d’une lignée glorieuse qui avait conquis le trône. Renversant ainsi les Laperts, rois corrompus et durs qui n'hésitaient pas à faire juger leurs vassaux pour s'adjuger leurs biens. Une période de prospérité s’ensuivit une fois les derniers vestiges de la rébellion écrasés. En bref, le royaume était en paix et Thibaut faisait partie de la jeunesse qui servirait le futur roi.
Il s’entraînait depuis son plus jeune âge à succéder un jour à son père. "Justice et Honneur" ces mots résonnaient dans son esprit chaque jour, gravés comme sur le haut du pont levis.
La simple pensée de régner un jour sur Montfaucon l'apeurait et l'excitait à la fois. Il se voyait déjà à la tête de ses vassaux pour écraser quelques brigands ou encore à donner une fête somptueuse au château, qui n'en connaissait que de trop rares. Il savait pourtant que ce n'était que rêves et que le quotidien du seigneur de Montfaucon consistait surtout à faire le tour des terres, à régler l'intendance et les questions de justice sur celles-ci.

Le drapeau annonçant le début de la joute fut abaissé et Thibaut lança instinctivement son cheval au galop. Il se sentit fort secoué dans son armure et serra les genoux encore plus. Seule importait la silhouette de son adversaire qui se rapprochait. Son œil se focalisa sur le cygne qui lui fonçait dessus. Thibaut gardait sa lance baissée afin de ne la relever qu'au dernier moment et de surprendre le cavalier adverse Le but était de casser sa lance sur le bouclier de l’autre et si possible de faire tomber l'autre jouteur.

La distance diminuait rapidement. Tout cela paraissait irréel à Thibaut, jamais il n'avait chevauché si vite et aucune chevauchée ne lui avait semblé prendre autant de temps. Soudain, il lui sembla que l'adversaire était trop proche et Thibaut releva sa lance par réflexe. Ce geste précipité fit tout basculer.
Lorsque les deux lances rencontrèrent leurs cibles celle de Thibaut ne fit que glisser le long du bouclier au cygne alors qu'il sentit l'autre lance se fracasser en plein contre le sien. Il lui sembla qu'il fut, un instant, le souffle coupé, figé dans le temps et l'espace alors que le monde continuait de bouger tout autour.
Désarçonné, il tomba soudain en arrière et s'affala par terre dans un fatras de ferraille.

"Autant pour l'honneur" pensa t'il. Ses oreilles bourdonnaient et son dos le faisait souffrir. Ce soir, père, déçu, allait le regarder d'un air triste et distant. "Je ne suis pas à la hauteur" murmura t'il. Il commença à sentir les larmes lui monter aux yeux et il aurait probablement continué à s'apitoyer sur lui-même si quelque chose ne lui sembla pas étrange.
Personne ne venait le remettre sur pieds et personne ne le huait. Il commençait pourtant à percevoir des cris et des appels au travers du bourdonnement de ses oreilles. Il tourna la tête et tenta de se relever. Les tribunes se vidaient et tous semblaient se précipiter vers la tribune princière. Que se passait-il donc? Les gens passaient en courant sur le terrain pour rejoindre l’attroupement. Les dames n’hésitant pas à soulever leurs jupes pour aller plus vite ce qui eu pour effet d’encore plus le perturber.
Reprenant ses efforts pour se relever, il se mit à tanguer sur lui-même pour enfin réussir à s’appuyer sur ses bras et se mettre à genoux. Il maudit son petit frère de ne pas être venu le relever et partit vers la foule massée.
- Le prince est blessé...un attentat...un attentat.
Il mit du temps à comprendre la signification de ces mots. Il ne les réalisa pleinement que lorsqu’il vit, brièvement à travers la foule, une civière lourdement gardée que l’on emmenait au château.
Sonné et se sentant totalement ignoré, Thibault se demandait presque si le monde n’avait pas subitement décidé qu’il ne méritait pas qu’on le remarque. Le prince ? Blessé ? Comment ?
Cette journée resterait probablement longtemps dans les mémoires ainsi que son échec. La honte et l’inquiétude brulaient les entrailles de Thibault.

Des voix se mirent à monter, des nobles criaient au scandale pendant que des gardes en nombre fouillaient le château. Epuisé par sa défaite, Thibault se mit à la recherche de son frère afin de se débarrasser de son armure.
Il partit ensuite se réfugier dans sa chambre en tentant d’oublier le babillage de Sorj. C’est sur le chemin de ses quartiers qu’un serviteur le héla :
- Messire ! Votre père désire vous voir, messire Thibault.
- Déjà ? Quelle poisse !
Le jeune page disparut et Thibaut prit le chemin de la chambre de son père, trainant la patte, son corps lui faisant payer sa défaite en le torturant de partout.
Il arriva penaud, hésitant à frapper à la porte. Il finit par le faire et attendit que son père l’invite à entrer.
Celui-ci était assis, face au feu-ouvert sur son lourd siège en bois et couvert de fourrure. Il avait les yeux perdus dans le vide:
- Tu veux me voir père ?
- Oui fils, il faut te préparer à partir et vite.
- Quoi ? Tu me bannis ? Simplement pa…parce que j’ai échoué ?

Il sentit les larmes monter à ses yeux.
Son père le regarda, interdit pendant un instant et puis éclata de rire.
- Ah mon fils, non ! Je suis toujours fier de toi tu sais, tu n’es pas un jouteur mais, pour être honnête, je n’en suis pas un très bon non plus. J’ai besoin de toi pour une mission bien plus importante, retrouver celui qui a tiré sur le prince
- Je croyais que les gardes fouillaient déjà le château ?
- Ils le font, mais crois-tu vraiment que l’assassin va rester ici en attendant d’être pris. Non il est déjà partis et tu dois le retrouver, les nobles de la suite du prince mettront probablement des semaines pour se décider à faire la même chose. Des hommes fidèles t’attendent dans la cuisine. Ils t’aideront dans cette tâche.
C’est très important mon fils, si nous ne pouvons prouver que nous n’avons rien à voir là dedans, notre famille sera déshonorée et je finirai sur un échafaud. Le roi n’est pas quelqu’un de tendre, il ne me pardonnera jamais ce drame.

Thibaut acquiesça, il avait toujours rêvé d’aventures mais il ne s’attendait pas à ce que de telles responsabilités lui incombent.
- Et le …le Prince ? Il va s’en sortir ?
- Il semblerait que le goût du Prince pour la bonne chair lui ait sauvé la vie, pour l’instant du moins. Reste à prier Bielor que sa blessure ne s’infecte pas.
Son père le serra dans ses bras :
- Va mon fils et sache que je serai toujours fier de toi. Fais surtout bien attention à toi, ceux qui ont fait ça peuvent tout autant être des courtisans jaloux de notre position que des ennemis venant de Liudmark. Quoi qu’il en soit, ils ne sont certainement pas à prendre à la légère. Ils ont eu des dizaines d’occasions de supprimer le prince sur la route mais ils ont préféré attendre pour le faire ici, dans notre maison ! Va maintenant et que Saint Lhor te protège.

Thibaut, rejoignit sa chambre, fébrile et oubliant presque la fatigue de son corps torturé. Il y choisit une tenue de voyage en cuir vert sombre, un haubert et des bottes solides. Il ceignit son épée à son côté et y ajouta le couteau qu'il avait reçu de mère pour ses quinze ans. Il partit ensuite vers la cuisine.
Il ouvrit la porte et découvrit quatre hommes, tous assis à table devant une bière et un pain creux plein de bouillon, les restes du repas princier probablement.
Un homme bien habillé dans des habits de satin avec de longs cheveux blonds lui cascadant sur les épaules se leva en souriant dès qu’il le vit arriver.
- Ah vl’a le petit seigneur ! Roland pour vous servir. Dit-il en s’inclinant. J’étais à la droite du prince lorsque celui-ci fut touché. J’aurais bien pris le carreau à sa place mais une grosse courtisane m’en empêcha pour se resservir de fraises à la…
Roland jouait des mains tout en parlant afin de mimer la scène ce qui fit sourire Thibaut.
- Arrête ton blabla, dit un autre homme à la mine grêlée et aux sourcils broussailleux, je m’appelle Adian mon seigneur, si l’assassin a pété à moins d’une lieue d’ici je le sentirai ! Et voici Philass, dit-il en désignant un petit homme en chausses élimées. Philass avait la mine fatiguée, il leva sa pipe en bois en signe de salut. Philass atteindrait une cible mouvante en pleine nuit avec son arc et le dernier laron est.. euh Luclin qui est…
- LUC-LIN ! finit le géant chauve dans un sourire dégoulinant de jus.
- Très doué pour être Luclin en effet.
- Je le connais répondit Thibaut en hochant la tête, il est souvent en faction à la porte du château.
Thibaut le connaissait en effet, Luclin s’il ne brillait pas par son intelligence était la plus grosse montagne de muscle des environs et il adorait les chats, il y’en avait toujours qui lui tournait autour pendant son tour de garde ce qui fascinait Thibaut.
Thibaut se dit quand même qu’il avait d’étranges compagnons, lui qui s’attendait presque à rencontrer des chevaliers immaculés de l’ordre de Saint Pryan, le voici avec quatre anciens gardes ou pire. Seul Roland était apparemment plus éduqué mais Thibaut voyait mal en quoi celui-ci allait être utile.
Ils prirent des provisions et se mirent en route, Roland lui collant aux basques racontait en détail ce qu’il avait vu : une ombre à la fenêtre du château avant que le prince ne s’effondre. Comme si ça allait aider quiconque quand bien même cela serait vrai.
Ils partirent vers le village de Préroman en bas de la butte où siégeait Montfaucon, si un étranger était passé inaperçu au château avec toute l’agitation, il ne serait par contre sûrement pas passé inaperçu au village.
Thibaut laissa Philass et Roland aller s’enquérir à l’auberge du village. Apparemment Luclin n’y était plus le bienvenu depuis qu’il y avait tout démoli parce qu’un homme l’avait traité de « mou du bulbe ». Thibaut nota mentalement de ne jamais faire la même erreur.
- Et la spécialité de Roland, qu’elle est-elle ? demanda Thibaut à Adian.
- Il ne faut pas se fier aux apparences, Roland invente beaucoup d’histoires et croit que son statut de bâtard de l’évêque de Rochefaud le met au dessus des autres. Mais il n’a pas son pareil pour faire parler quelqu’un.
- Faire parler…tu veux dire tor.. ?
- J’en sais rien et je veux pas le savoir mais en tout cas on pourrait avoir besoin de lui si on met la pate sur l’assassin.
Les autres revinrent bredouille. Roland avait cependant un petit sourire satisfait sur le visage. Thibaut en compris la signification lorsqu’il vit la serveuse lui faire signe de la porte avant de se faire rappeler à l’ordre, et accessoirement à l’intérieur de l’auberge, par le patron.
La nuit tombait et ils se mirent d’accord pour éviter la route royale, jamais un assassin ne prendrait le risque d’emprunter une route autant patrouillée. Ils partirent donc vers le nord en suivant les chemins forestiers en espérant qu’ils pourraient trouver un indice au prochain village.
Thibaut peinait sous son lourd sac de toile cirée, il n’était pas sûr d’avoir eu une si bonne idée en emmenant son haubert de maille. Il ne servirait de toute façon à rien dans son sac. Et il se doutait que les autres se plaindrait du bruit s’il l’enfilait.
Les autres voyageaient léger, Luclin ne portait qu’un gros sac de toile, rempli de boustifaille et de matériel, accroché à une hache qu’il portait à l’épaule. Adian et Philass portaient chacun une besace à leur ceinture et Roland ne portait rien du tout, évidemment.
Celui-ci se mit d’ailleurs à divaguer sur les yeux bleus de la serveuse de l’auberge et Thibaut cessa assez vite de l’écouter, d’ailleurs seul le géant semblait porter de l’intérêt à ce que disait Roland.
Ils montèrent le camp dans une clairière une fois la nuit tombée, Thibaut se sentait oppressé par les arbres et le ciel. Il n’avait encore jamais dormi en dehors des murs du château. Après avoir mangé chichement, chacun s’enroula dans une couverture, Roland avait apparemment fait porter ses affaires par Luclin.
Thibaut se sentait tellement différent par rapport à ses compagnons, tellement étranger à cette aventure et sur le moment il n’eut pas l’impression d’avoir à mener une mission capitale pour sa famille. Il frissonna en entendant les sons de la forêt, des rongeurs faisaient bruisser les herbes, un hibou appelait au loin. Il ne put s’endormir qu’une fois Luclin lui-même endormi. Jamais Thibaut n’avait entendu ronfler si fort mais étrangement cela le fit se sentir en sécurité et lui rappela les murs du château.


©2006-2007 SA_Avenger

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